Projet "Déclin des espèces"

Déclin des espèces

Quantifier le déclin des espèces à partir de données génomiques et d’occurrences

Déclin des espèces

Présentation

Le risque d'extinction de 99,9% des espèces vivantes est inconnu, en particulier pour les invertébrés, cœur de la biodiversité multicellulaire. Il est nécessaire d’employer de nouvelles méthodes pour quantifier efficacement la crise en cours de la biodiversité, rapidement et à grande échelle. Nous avons récemment développé de nouvelles méthodes pour inférer la démographie des espèces à très court terme, soit depuis le début du vingtième siècle, date approximative estimée du début de la sixième extinction de masse. Ces méthodes sont basées d’une part sur des données génomiques (génomes « complets » d’un échantillon d’une dizaine d’individus diploïdes) et d’autre part sur des données d’occurrences (présence/absence/abondance d’une espèce à une localité au cours du temps sur quelques décennies). 

En bref, le déclin très récent d’une espèce ne laisse que peu de traces sur les patrons génomiques moyens, tels que la diversité nucléotidique moyenne, ou la distribution de fréquence des mutations, mais change significativement les patrons de recombinaison observés dans un échantillon de génomes (Kerdoncuff et al., 2019, biorxiv). Par ailleurs, des informations sur l’occurrence, ou mieux encore l’abondance, d’espèces dans des localités données peuvent être utilisées pour estimer la probabilité d’extinction, ou le déclin d’espèces à l’échelle locale ou globale (Régnier et al., 2015, PNAS).

Le projet s’inscrit dans un programme de recherche porté par un consortium multidisciplinaire porté par Guillaume Achaz qui comprend une dizaine de chercheur.e.s et enseignant.e.s-chercheur.e.s spécialisé.e.s en écologie et taxonomie (J Fuchs, C Fontaine, B Fontaine, L Legall, V Prié, R Rougerie), en bioinformatique (R Vignes-Lebbe, S Brouillet) du Muséum National d'Histoire Naturelle, ainsi qu’en mathématiques et modélisation (A Lambert, E Schertzer) du Collège de France. Il se base aussi sur une collaboration avec deux équipes américaines de Harvard (T Sackton) et Stanford (D Petrov).  
Dans le cadre du projet, le consortium génère et assemble des données de génomes complets dont la démographie est connue (p. ex. oiseaux d’Europe, moules d’eaux douces et insectes pollinisateurs) ou inconnues (p. ex. lépidoptères, algues de la côte bretonne). Il rassemble également des données d’occurrences, voire d’abondance quand cela est possible, pour la plupart des espèces dont le génome est séquencé.

La projet de cette thèse consiste à faire l’analyse des risques d'extinction à partir de suivis temporels d'occurrences et de séquences des génomes complets de grands singes, d’oiseaux, d’insectes et d’algues pour lesquels nous avons des données soit déjà prêtes soit en cours d’acquisition. Nous appliquerons les méthodes "classiques" de génomique des populations et d’analyse de données d’occurrence mais également les méthodes de vraisemblance maximisée récemment développées par les modélisateurs du consortium. Les méthodes seront comparées et améliorées au vu des connaissances taxonomistes expertes. Les allers-retours entre les experts taxonomistes et les modélisateurs permettront une synergie positive qui assurera la validité des méthodes et des inférences proposées. Bien que cette thèse soit principalement orientée vers l’inférence de scénarios démographiques concrets à partir de méthodes déjà existantes, elle pourra selon le profil du/de la candidat.e également s’intéresser au défi méthodologique qui consiste à intégrer les deux types de données (génomiques et occurrence) dans un unique cadre démographique commun. Il est en effet possible de construire un modèle stochastique ad hoc pour calculer une vraisemblance jointe intégrant les deux sources d’information, en se servant du fait que les deux types de données sont indépendantes conditionnellement à la démographie (inconnue).

Chaque espèce choisie sera dans un premier temps analysée séparément. Lors de la troisième année, le/la candidat.e fera la méta-analyse de tous les jeux de données disponibles. Il/elle testera alors les causes du déclin en contrastant les scénarios démographiques entre (a) zones géographiques différentes (p. ex. continent, pays), (b) entre milieux terrestres et marins et (c) également entre environnements urbains et ruraux.

 

AAP 2020
Porteur : Guillaume Achaz (EA – UMR 72006) 
Co porteurs : Amaury Lambert (LPSM – UMR 8001) – Jérôme Fuchs (ISYEB – UMR 7205)
Doctorant : Thomas Forrest