Les phobies animales, cas extrêmes de malentendu avec la nature ?
La perception des animaux se répartit selon un gradient allant de la fascination, l’attraction, la peur, jusqu’à la phobie. L’objectif de ce projet est d’évaluer le poids des facteurs socio-écologiques et culturels sur la perception des animaux et de mieux comprendre l’origine évolutive des phobies animales.
Le contexte
La perception des animaux par l’espèce humaine se répartit selon un gradient allant de la fascination, l’attraction, la peur, jusqu’à la phobie. La position d’un animal sur ce gradient dépend de l’interaction de facteurs évolutifs (e.g. écologiques, phylogénétiques) et culturels (e.g. apprentissage social, expérience) de la perception du danger. Ainsi, il est intéressant de constater que les grands félins, qui sont des animaux dangereux pour les humains, exercent autant d’attrait pour le grand public tandis que les araignées, qui sont pour la plupart inoffensives, causent autant de frayeurs. Parmi les phobies animales, la plus répandue est celle des serpents (ophiophobie) et la théorie scientifique dominante (Snake Detection Theory) stipule que cette phobie animale est innée, génétiquement encodée et aurait façonné l’évolution de la lignée humaine.
Les objectifs
L’objectif de ce projet doctoral est de mieux comprendre l’origine évolutive des phobies animales, en prenant comme cas d'étude la phobie la plus fréquente, celle des serpents (ophiophobie). Il a pour but de tester chez des primates humains et non-humains si les serpents occupent une place particulière par rapport aux autres prédateurs, tels que les félins (e.g. léopards) et les rapaces (e.g. harpie féroce), et d’évaluer le poids des facteurs socio-écologiques et culturels sur la perception des animaux. Ce projet vise donc à mesurer les réactions exprimées face à des images d’animaux et à les comparer (1) selon la nature des animaux présentés (e.g. position phylogénétique, degré de menace) (2) entre les espèces de primates testés, ayant des positions phylogénétiques et des contraintes socio-écologiques variées, et (3) entre des groupes de sujets humains diversifiés (e.g. âge, sexe, origine géographique).
L'approche et l'équipe
Ce projet doctoral repose sur une approche transdisciplinaire menée par un consortium impliquant trois unités de recherche : UMR 7206 (EA), UMR 6024 (LAPSCO) et UMR 7372 (CEBC). Nous combinerons des investigations chez des primates humains et non-humains par 1) une exploration des réponses de sujets humains face à une grande diversité d’images d’animaux, représentatifs de ce qui existe - ou existait - en conditions naturelles, grâce à des questionnaires internet (plateforme Biodiful.org – mise en situation interactive), et 2) une analyse des réactions comportementales et physiologiques face une large gamme de prédateurs et d’animaux dangereux ou inoffensifs.
L'adéquation à l’initiative IBEES
Un groupe de chercheurs.ses s'est nouvellement formé pour ce projet interdisciplinaire sur les phobies animales ; appuyé sur 3 UMR, il est basé sur la complémentarité de l’écologie évolutive, de l’anthropologie biologique et de la psychologie sociale et cognitive.
L’approche mobilisée permettra d’accroître nos connaissances fondamentales sur une partie importante de la perception de la nature, son caractère inné vs. acquis et son évolution chez les primates. Un élément majeur est la prise en compte du gradient des réactions, de la fascination à la phobie, ainsi que d’une gamme étendue d’espèces en incluant prédateurs, animaux dangereux ou inoffensifs, espèces charismatiques ou mal-aimées.
Publications
- Primate–Predator Interactions: Is There a Mismatch Between Laboratory and Ecological Evidence?, Karl Zeller, Cécile Garcia, Audrey Maille, Julie Duboscq, Luca Morino, Guillaume Dezecache, Xavier Bonnet, Int J Primatol (2022)
- Spot the odd one out: do snake pictures capture macaques’ attention more than other predators? - Karl Zeller, Sébastien Ballesta, Hélène Meunier, Julie Duboscq, Luca Morino, Adam Rimele, Xavier Bonnet, Audrey Maille, Guillaume Dezecache & Cécile Garcia, Animal Cognition (2023)
Communications orales
Zeller K, Garcia C, Maille A, Duboscq J, Morino L, Dezecache G, Bonnet X. 2022. Where are the big cats and eagles? Snakophilia in the primate literature and the neglect of other key predators as drivers of primate evolution. Ecology & Behaviour Meeting, 21-24 mars, Strasbourg, France.
Bonnet X, Zeller K, Dezecache G, Garcia C. 2022. Snake Detection Theory : comment les serpents ont façonné des primates pendant plus de 55 millions d’années. Congrès annuel de la Société d’Herpétologie de France, 6-8 octobre, Belleville en Beaujolais, France.
Zeller K, Bonnet X, Dezecache G, Duboscq J, Maille A, Morino L, Meunier H, Ballesta S, Mouquet N, Garcia C. 2022. Les phobies animales, l'obsession des chercheurs pour les serpents. Journée DIPEE Nouvelle-Aquitaine – Centre-val-de-Loire : La biodiversité dans tous ces états, 2 juin, Poitiers, France.
Poster
Zeller K, Ballesta S, Meunier H, Maille A, Duboscq J, Morino L, Rimele A, Dezecache G, Bonnet X, Garcia C. 2022. Evaluation des capacités de détection des prédateurs chez le macaque de Tonkéan (Macaca tonkeana). Colloque de la Société Francophone de Primatologie, 4-7 octobre, Aix en Provence, France.
Ateliers scientifiques
Zeller K, Adam J, Guieysse-Peugeot A, Detouillon E. 2023. Serpents & Émotions : à la découverte d'animaux mal-aimés. Les rendez-vous de la science du MNHN, Paris, France.
Vulgarisation
Zeller K. 2023. Les serpents ont-ils façonné l'évolution humaine ?. Pint of Science Festival, 22-24 mai, Paris, France.
Contacts
Porteurs :
- Cécile Garcia - Courriel - Tél. 01 73 78 28 03 - Site
- Xavier Bonnet - Courriel - Tél. 05 49 09 78 79 - Site
- Guillaume Dezecache - Courriel - Tél. 04 73 40 64 58 - Site
Doctorant : Karl Zeller
Appel à projet : AAP 2020
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